En 1789, la monarchie et le pouvoir des autorités religieuses sont contestés. La société française héritière du système féodal est hiérarchisée en trois ordres inégalitaires (noblesse, clergé et tiers état) et son organisation est figée par des principes d’une autre époque. Les provinces n’assurent pas l’égalité entre les Français. Les lois, les impôts, les privilèges et les unités de mesure sont différents selon les régions. Il existe même des douanes intérieures. A tout cela s’ajoute la crise financière qui s’aggrave au cours du règne de Louis XVI. Pour couronner le tout, les mauvaises récoltes de 1787 et 1788 provoquent une hausse du prix du pain et le peuple souffre de disette. Face à la crise, le Roi se voit contraint de convoquer les États généraux1.
Le 24 janvier 1789, le monarque adresse au bailli2 de Senlis, dont dépend Villers-Saint-Paul, les lettres convoquant les représentants des trois ordres. Le 11 mars l’assemblée électorale se réunit. Pour la noblesse, le vicomte de Pons représente Louis Joseph de Bourbon-Condé, prince de Condé seigneur entre autre de Creil, de Villers-Saint-Paul et de St-Maximin, mais aussi Claude Louis Jacobé de Naurois en tant que propriétaire du fiefs des Marquets et Marc Antoine Randon de la Tour seigneur des fiefs des Granges, Bouleux et Saucy à Nogent et du fief de Mortefontaine. La paroisse de Villers-Saint-Paul du curé Pierre Demonchy est représenté par Legat, curé de Courteuil. Il n’y a pas de Villersois pour représenter le tiers état.
Les délégués rédigent des cahiers de doléances qui expriment les plaintes, proposent des réformes puis élisent 4 députés. Sont élus, pour le Clergé, Jean-Baptiste Massieu, curé de Cergy ; pour la Noblesse Pierre-Marc-Gaston de Lévis, seigneur d’Ennery ; pour le tiers état Charles-Christophe Leblanc, conseiller au présidial (tribunal), maire de Senlis et Nicolas-Pierre-Antoine Delacour, fermier de la seigneurie à Ableiges (dans l’actuel Val-d’Oise).
Assurer l’égalité entre les citoyens
Dès l’ouverture des Etats généraux, le 5 mai, les événements vont se précipiter. Face au blocage institutionnel, les députés du tiers état protestent et se constituent, le 17 juin, en Assemblée nationale. Le 20 juin avec le Serment du jeu de Paume les députés décident de rédiger une constitution. Le 9 juillet, l’Assemblée nationale prend le nom d’Assemblée nationale constituante. Elle va réformer en profondeur le pays.
Pour assurer l’égalité entre tous les Français, elle supprime les provinces avec ses privilèges, ses lois, ses poids et mesures particuliers et instaure les départements de taille équivalente respectant la même loi et les mêmes règles. L’Oise est créé, le 4 mars 1790 en application de la loi du 22 décembre 1789.
Le 11 novembre 1789, l’Assemblée décrète qu’« il y aura une municipalité dans chaque ville, bourg, paroisse ou communauté de campagne ». Les agents municipaux (maires) sont élus au suffrage direct pour 2 ans par les citoyens actifs payant une contribution au moins égale à 3 journées de travail dans la commune. Sont éligibles ceux qui paient un impôt au moins équivalent à dix journées de travail. Le premier maire villersois est Jean-Louis Camus. Les noms des paroisses devenues communes changent : Villers-Saint-Paul devient Villers-Paul ; Liancourt, L’Unité-de-l’Oise ; Chantilly, Champ-Libre ; Compiègne, Marat-sur-Oise.
Avec la constitution civile du clergé, l’Assemblée instaure l’état civil, introduit le divorce et le mariage civil, supprime le privilège d’aînesse dans les héritages. Le 20 septembre 1792, elle confie aux municipalités, le soin de tenir les registres par un officier public élu, chargé de recevoir et rédiger les actes sans distinction de religion.
Sur les registres de la paroisse de Villers-Saint-Paul, le dernier acte rédigé et signé par le curé de l’époque Pierre Demonchy, porte la date du 23 octobre 1792.Le registre est clos le 28 octobre 1792, (7 brumaire de l’An I). C’est ce même curé, qui est choisi pour devenir officier public. Le premier acte d’état civil, daté du 26 novembre 1792, est un acte de naissance (pas de baptême) : celui de Louis Firmin Fourniquet, fils de Firmin Fourniquet, vigneron, et de Suzanne Barbiot.
Le dernier seigneur du Château de Mortefontaine
Avant la révolution Marc-Antoine Randon de La Tour était trésorier général de la Maison du Roi. Il venait de faire rebâtir le château de Villers-Saint-Paul et était propriétaire de l’hôtel Le Roy de Senneville, rue Royale à Paris.
En 1789, il participe à l’élection des députés aux états généraux et en 1791 il devient colonel de la garde nationale de Creil. Pendant la terreur, la Convention envoie dans les départements des représentants chargés de réprimer les contre révolutionnaires. Les comités de surveillance dressent des listes de suspects. Malgré de nombreuses attestations de civisme le « citoyen Randon dit la Tour» est accusé d’avoir dissimulé des meubles de luxe dans une maison de Senlis. Le 30 frimaire de l’an II (20 décembre 1793) il est enfermé au château de Chantilly, devenue entre temps la plus grande prison du département. Transféré au couvent des Carmes, rue de Vaugirard à Paris puis traduit devant le Tribunal Révolutionnaire, il est condamné à mort le 9 messidor de l’an II (27 juin 1794) et guillotiné le jour même.
Avec l’aimable collaboration d’Evelyne Bonnecaze et de Bernard Develter.
Texte paru dans le Bulletin municipal n° 88 du printemps 2019.